Cartographier une histoire des origines de la vidéo québécoise. Écrire de mémoire, trou noir obligé. Fermer les yeux pour voir, voir mieux ce qui se loge sous l’envers des paupières sillonnées par les phosphènes. Écritures lumineuses, images prégnantes des rubans noirs de la collection Vidéographe.

Réalisé par René Roberge en 1991, Vidéographe vu et par s’impose comme oeuvre de mémoire. En excavant des archives de la collection de l’organisme des segments vidéographiques signifiants comme autant de repères scintillants des deux premières décennies de la vidéo indépendante au Québec, le réalisateur trace une histoire constellaire des évolutions technologiques, des figures esthétiques et des nouvelles écritures qui en dérivent. Il inscrit son projet dans une perspective socio-historique éclairante qui l’impose avec persistance comme Archive du phosphore et qui nomme la vidéo comme médium de mémoires individuelles et collectives.

Vidéographe, quelques repères

Au milieu des années soixante, l’émergence d’une nouvelle technologie, l’enregistrement magnétoscopique, est pressentie par certains individus, artistes et communicateurs, comme un nouvel outil de création. En effet, la vidéo laissait entrevoir un large champ de potentialités offrant un accès à l’expérimentation qui allait permettre de définir la singularité du médium.

Principalement motivé par cette intention et stimulé par certaines expériences new-yorkaises de télévision expérimentale, Vidéographe vit le jour rue Saint-Denis en novembre 1971. Lancé dans un climat d’effervescence intellectuelle et sociale, ce dont les bandes d’archives témoignent avec éloquence, Vidéographe fut le premier centre de production vidéographique au Canada.

Lieu privilégié de recherche et d’expérimentation, laboratoire singulier doté d’une infrastructure remarquable pour l’époque, cet organisme permettait à quiconque le désirait de réaliser un projet.

Issu du programme Société Nouvelle de l’Office national du film, Vidéographe établira dès son origine les paramètres d’interventions qui demeurent encore aujourd’hui les piliers de sa fondation. Parmi les plus importants, notons un centre de production, un service de diffusion, une salle de visionnement public, s’accompagnant naturellement de l’archivage des vidéogrammes qui suscitera au fil des ans la création d’une impressionnante collection.

En 1973, lorsque Vidéographe obtient sa charte d’incorporation, il met fin à son association avec l’ONF et acquiert un statut d’organisme à but non lucratif dont le mandat est la promotion et la diffusion de la vidéo indépendante. Dès lors, par la diversité et la pertinence de ses actions, Vidéographe aura donné les preuves d’une vitalité et d’un engagement incontestables. En effet, la résistance de l’organisme illustre sa constance : « car le plus stupéfiant dans l’aventure de Vidéographe c’est encore la force de sa durée transformée tout au long de son histoire par l’air du temps et l’énergie de sa composante humaine » (1).


(1) Robert Forget in Répertoire A.Z, Vidéographe p.3
 

Outils documentaires :

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