L'une des questions centrales de la philosophie a toujours été : « Que puis-je connaître ? » Du côté de chez Locke en fournit une illustration frappante. Dans ce court film, Donigan Cumming s'intéresse à l'histoire de son frère aîné, qui semble avoir passé la plus grande partie de sa vie dans des institutions spécialisées à la suite d'un incident cérébral. Cumming se plonge dans de vieilles photos de famille et des documents médicaux, commentant ce qu'ils révèlent ou ne révèlent pas. Avec une pointe de désespoir, il demande : « Julien (surnommé Jerry) était-il vraiment anormal ? Si tel est le cas, quelle était la cause de cette anormalité ? Quelles incidences cela a-t-il eu sur le reste de la famille ? »
Cumming parle derrière sa caméra vidéo, qui enregistre les mouvements de son corps et sa respiration saccadée. Il réagit de façon autant physique que psychologique au mystère que représente Jerry. Par moments, il fuit littéralement le problème en quittant la cave où sont entreposées les photos. Mais il se force à y redescendre pour affronter les archives familiales. Lorsqu'il est en haut, ses émotions sont celles d'un adulte rationnel, quand il retourne à la cave, il descend dans le monde émotionnel de son enfance. Cumming a déclaré que ce travail avait deux références principales, le philosophe anglais John Locke et l'écrivain français Marcel Proust. Locke soutenait une approche empirique de la connaissance, tandis que Proust s'en remettait au souvenir de l'expérience. Du côté de chez Locke confronte ces deux approches, mais la conclusion — tout comme les interrogations sur la vie de Jerry — demeure inconnue.
Marcy Goldberg, Visions du reel, 2003
(Traduction : Emmanuelle Maupetit)
Générique/Crédits
Informations techniques
Documentation
Voir aussi :
Le Blanc, Florence. « Performer l’intime : le film Locke’s Way de Donigan Cumming. » Revue Chameaux, no 7, 2014.
Le Blanc, Florence. « Performer Proust : Locke’s Way de Donigan Cumming et La dernière bande de Samuel Beckett. » Babel : Littératures plurielles, no 33: Littératures et arts contemporains : l’hybridité à l’œuvre IV. Réécriture et intermédialité, 2016, pp.197-211.