Dans cet essai, Falardeau présente la lutte sportive comme un rituel qui «sert à régler les problèmes incontournables d’une société» à travers la structure même de la lutte et de sa dualité manichéenne entre les bons et les méchants. Le documentaire, qui fonctionne comme un lieu de catharsis, s’ouvre sur les mots, les images et les sons du combat politique du Québec : «SOS FLQ Continuons le combat.» Le public à l'écran devient l'acteur de ce spectacle percutant où les lutteurs s'affrontent dans l'arène sous la surveillance de l'arbitre. Cette vidéo, produite dans les soubresauts de la crise d'octobre 1970, est chargée de cette expérience identitaire amère et caustique, qui a marqué les aspirations politiques de l'époque. On reconnaît le «style Falardeau» à travers une narration très forte qui appuie et transcende les images jusqu'à la finale abrupte, qui termine la vidéo.
Série
Générique/Crédits
Informations techniques
Documentation
«Un combat de catch, un commentaire en voix off, c'est tout. C'est cependant la plus virulente critique sociale jamais entendue. Le catch n'est pas ici considéré comme un sport. C'est un rituel populaire qui vient régler des problèmes que la société est incapable de résoudre par ailleurs. Une lutte qui devient un spectacle est un pétard mouillé. Les médias ont compris cela, aujourd'hui. Si des ouvriers déclenchent une grève, il suffit que la télévision dramatise l'évènement, le présente comme si c'était une fiction jouée par des personnages, le tout entre deux plages de publicité, pour que la lutte soit d'emblée désamorcée. Le catch, c'est l'affrontement du bien contre le mal. C'est aussi un cour de morale, le méchant doit être battu ! Le Mal extirpé, la société retrouve sa quiétude. En langage militaire, on appelle cela une pacification. L'ordre social est synonyme de Justice. Ceci dit, il faut faire des films comme ça. Dénoncer les stratégies de nos ennemis de classe peut nous aider à mieux nous défendre... oui, "Continuons le combat" ! Oui, osons encore accuser réception des coups portés contre nous par nos Maîtres, osons nommer l'injustice et comme ZOLA, prenons nos pics et nos pioches, nos caméras, notre voix, nos plumes, notre responsabilité d'hommes libres, et inscrivons des "J'accuse !" sur les murs du silence.»
BOUDARD, Alphonse. «La société du spectacle», Samedi, (14 novembre 1998), p. 6.